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Javier Pérez

Un souffle
6 avril - 18 mai 2024
Vernissage samedi 6 avril , 15h - 20h 


Le temps d’un souffle

La nouvelle exposition de Javier Pérez embrasse trois lignes de travail qui se déploient comme un rhizome dans la démarche de l’artiste : chaque série est une ramification qui ouvre vers une direction nouvelle mais demeure reliée avec l’ensemble de l’œuvre. Bien que singulières ces trois lignes de travail possèdent un point d’ancrage commun : la branche, l’arbre, la forêt. Forêt intérieure, philosophique, chaque œuvre s’y donne comme expérience temporelle d’où émane l’énergie d’un mouvement. Un mouvement non linéaire, fait de polarités et d’éternels retours. Comme une vague. Un souffle. Qui matérialise la pulsation de la vie, de la création et de la connaissance.

Avec Polaridad (2023-24), un ensemble de quatre diptyques dessinés à l’aquarelle, pastel et fusain sur carton noir, le travail de Javier Pérez matérialise le mouvement de la lumière. Dans la continuité des séries Caminos (2021-22) et Fuera del Camino (2022-23), réalisées à partir de photos prises dans la forêt, Javier Pérez fait ici dialoguer en diptyque deux dessins, l’un sombre, l’autre très éclairé où le motif tend à disparaitre. Par un usage singulier de l’aquarelle, le pigment étant très peu dilué et travaillé en épaisseur, l’artiste transmue la lumière en matière. Une matière métallique, d’or et d’argent mêlés, qui recouvre l’obscurité du support jusqu’à totalement l’ensevelir de son éclat intense. Fragile frontière du néant inerte vers la vibration irradiante de la création.

Avec les sculptures Los tres sueños de Descartes (2023) et l’ensemble de six dessins intitulés Representación y Pulsión (desvelo de la razón) (2023), le travail de Javier Pérez se situe sur une nouvelle ligne de tensions en faisant jouer le mouvement libre de formes végétales contre la linéarité de formes géométriques. L’organique et le vivant ne cessent de croitre, de proliférer, par-dessus, au-delà des limites de cet ordre linéaire. Comme si se dessinait dans l’espace la libre énergie du vivant que ne peut contenir le désir de contrôle de nos sociétés modernes. Energie pulsionnelle qui repousse les enclos de ce que l’on croit connaître. Des fissures de doutes germant dans nos murs intérieurs.

L’ensemble de sculpture et dessins intitulé Inspiración – expiración (2024) donne corps aux tremblements fragiles de la vie. Des visages qui crachent du feu dans le noir. Des squelettes qui escaladent des printemps. Des fleurs poudreuses comme de la cendre. La mort dans l’œuf et vice versa. Il n’y a pas de sens linéaire ni logique. Que des morceaux d’histoires sans début ni fin. Des graines et des os qui vont et viennent à l’envers du cadran. Expirer des soleils inspirer des hivers. La vie ne tremble que dans cet entre-deux ténu. Un flash de beauté dans cet interstice-là. Le temps d’un souffle.

Amélie Adamo
Auteure, commissaire indépendante

Mars 2024